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Et le (a) Vice-Président (e) est…

Déc 08, 2020

La Noël et la nouvelle année (2021) pointent à l’horizon. Le Président Deby Itno a l’occasion de jouer au père Noël. Il a dans son sac un cadeau pour les Tchadiens. Un gros cadeau. Il a voulu instituer la Vice-présidence. Il l’a formellement obtenu lors du second forum inclusif. Il y a quelques semaines, le conseil des ministres l’a approuvé. La semaine dernière, l’Assemblée nationale l’a adoptée. Quelques noms circulent. Analyse, portraits et pronostiques de potentiels noms sur la « short list » des vice-présidentiables. Et le Vice- président ou la Vice-présidente est…

Ngléndouksia Nassour Ouaïdou, le revenant

L’ancien Président de l’Assemblée nationale Nassour Glendouksia Ouaïdou (NGO) est semble-t-il en tête de liste. Il revient d’une longue traversée du désert, s’il est choisi. Et le revenant ne revient pas n’importe comment. Ni à n’importe quel poste : c’est comme Vice-président. Une douce revanche pour celui qui a un peu mal fini avec le président lorsqu’il a appris son lâchage comme Secrétaire général de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC) par fax, il y a quelque temps. Très remonté contre le président Deby Itno et ses amis politiques il est rentré se terrer loin de la capitale, dans son immense propriété, dans sa bourgade de Gounougaya. Il ruminait sa colère. Le président l’a laissé au repos, feignant de l’oublier tout en demandant de ses nouvelles par des intermédiaires. Fatigué de tomber dans l’oubli, il refait surface de temps à autre dans la capitale, N’Djamena, lors des grandes cérémonies. Il ne manque pas de signifier sa présence en grognant sur son abandon politique. Il a dernièrement été ramené aux affaires à la tête de l’Inspection générale d’État.  

Ses forces : Homme de terrain. Son isolement forcé lui a donné le temps du recul et de la réflexion loin des intrigues politiciennes. Natif du Moyo-Kebbi une des zones populeuses, il représente une figure sans histoire. Et même un trait d’union entre le Grand Nord et le grand Sud du pays.

Ses faiblesses : son âge avancé. Sa santé chancelante. Il est le favori, mais un peu en déphasage avec les réalités politiques du pays. Le président veut rattraper sa faute d’avoir oublié cet allié qui l’a bien servi sans chercher la confrontation lorsqu’il était Premier ministre. C’est un choix sentimental qui ne représente aucun risque. Et c’est surtout un cobaye pour tester le nouveau dispositif d’un système atypique, le régime présidentiel intégral. 

Calculateur, le Président Deby Itno fait le pari que l’ex-Premier ministre et ex-Président de l’Assemblée Nationale saura tenir sagement son rôle protocolaire. Sans plus. Sans moins.

Nourredine Delwa Kassiré Koumakoye, l’indémodable

Ancien Premier ministre, plusieurs fois ministres, chef du Parti Viva-RNDP, surnommé « Kascou » M. Kassiré Koumakoye (KK) a travaillé avec tous les régimes depuis l’indépendance du pays. Opposant et ami politique selon les opportunités et les alliances de circonstances, inconstant et versatile, KK a participé avec fougue aux deux forums qui ont conduit à la naissance de la 4e République. Il réclame en être le père. Redoutable animal politique, il n’a pas d’états d’âme. Selon nos sources, il serait le deuxième choix sur la liste du président Deby Itno.

Ses forces : sa fine connaissance des Tchadiens, du jeu et des intrigues politiques. Il est natif de la Tandjilé. Batailleur politique, il est un atout tant par son verbe facile que par sa connaissance du pays profond. Il se décrit lui-même comme fils de paysan, il parle sans retenue dans un langage très coloré.

Ses faiblesses : sa longue présence sur la scène politique. Son respectable âge et son état de santé précaire. Ses sorties à l’emporte-pièce lui ôtent un peu de sa sagesse. Il est difficilement contrôlable, prend des libertés avec la vérité. Il veut à tout prix être au-devant de choses. Si le choix du président se porte sur lui, ce sera par récompense à son appui au projet de la 4e République.

Le président Deby Itno craint une chose : M. Kassiré peut, une fois désigné vice-président, se prendre pour le vrai président. Faire le khalife à la place du khalife.

Mme Maryam Mahamat Nour, la consensuelle

Si M. Kassiré réclame à tout va être le père de la 4e République, Mme Nour peut aussi le faire, mais s’y refuse. Ce n’est pas son genre. Question de caractère probablement. Pourtant, elle était aux manettes comme présidente du présidium durant les 2 forums. Loyale elle fait de la politique à « l’ancienne » avec beaucoup de retenu sans se jeter dans des querelles politiciennes. Plusieurs fois ministres avant de quitter le pays pour diriger durant quelques années des agences onusiennes, elle est de retour au pays depuis quelques années. Cette native du Chari-Baguirmi a repris service comme ministre du Plan et présentement ministre Secrétaire général du gouvernement, chargé de relation avec le parlement et de la question du bilinguisme. Elle semble se plaire dans ce ministère. Elle fait jeu égal avec M. Gléndouksia comme premier choix.

Ses forces : Elle est consensuelle et respectée par les Tchadiens. Elle est une femme d’expérience. Et le président Deby Itno pourra jouer la carte féminine pour faire taire les critiques et brandir ce choix comme une avancée démocratique. Même plus, une avancée historique du pays voire de la région sahélienne et de l’Afrique centrale. Elle a aussi à son avantage, une parfaite connaissance des rouages de l’État et du fonctionnement des partenaires techniques et financiers. On dit qu’elle est une femme de principe, intègre. Et qui a une haute idée de l’État.

Ses faiblesses : ancienne école, peut porter aux combats politiciens au sens péjoratif. Elle n’est pas solidement ancrée dans le parti au pouvoir composé majoritairement d’hommes se réclamant militant de première heure. Elle place l’État au-dessus de tout, ce qui n’est pas du goût de l’entourage du « Raïs » et des caciques du parti qui peuvent contrer son autorité.

Le président Deby itno, veut marquer la modernité de son nouveau système en choisissant une femme comme Mme Nour surtout, dit-on, pour sa détestation de la politique « politicienne » et sa rectitude. C’est une femme consensuelle qui sait tenir son rang.

Moussa Faki Mahamat, le distant

Président de la Commission de l’Union Africaine (UA), les Tchadiens se rappellent de lui comme virulent critique du régime MPS lorsqu’il enseignait le Droit à la faculté d’Ardepjoumal. Récupéré par le président Deby Itno, il s’est mouillé la chemise. Plusieurs fois ministres, longtemps ministre des Affaires étrangères et de l’Intégration Africaine, il doit tout ou presque au président. Notamment, le fait de l’avoir choisi, parrainé et l’avoir fait, habilement, élire à la tête de l’UA. Même l’intéressé ne s’attendait ni à ce parrainage ni à son éventuelle victoire. Cette consécration a poussé plusieurs à le désigner comme dauphin politique du président. Toutefois, il serait le dernier choix du président disent nos sources.

Ses forces : intelligent. Travailleur. A une grande expérience de la classe politique et des arcanes de l’État. Son élection à la présidence de la Commission de l’UA lui a donné une stature de présidentiable. Son éloignement du pays lui a donné le recul nécessaire. Son âge moins avancé par rapport aux autres est un atout. Il connaît le parti, tout en tentant de rester au-dessus des intrigues politiques.

Ses faiblesses : Peu reconnaissant envers le président et ses amis de longue date. Il n’y a pas longtemps, le président Deby Itno l’a boudé. Il le trouvait peu reconnaissant depuis son installation à Addis-Abeba. On le décrit comme arrogant et centré sur lui-même. N’a pas su ou pu bâtir un bon réseau de fidèles lieutenants au pays. Il semble être un homme seul. Son âge est un couteau à double tranchant. Il est en queue de liste.

Le président est très hésitant pour son cas. Son poste lui donne beaucoup de visibilité qui irrite parfois le locataire du palais Rose. Il lâche, dit-on, souvent en privée cette phrase, « …mais Moussa, pour qui se prend-t-il? ». Cela laisse deviner pourquoi Moussa Faki serait le dernier choix du président.

XXX, l’inconnu

Des nombreuses sources affirment que le président Deby Itno fera une surprise. Il sortira de son sac, tel le père Noël, un (e) ou un inconnu (e). Il voudra par ce choix marqué une rupture. Mais dans le fond, il aime surprendre et prendre à contre-pied les pronostics des observateurs de la scène politique. Il affectionne cela. C’est son dada.

Opinion

De toutes les façons, le poste de vice-président est créé et validé. Que cela soit à tort ou à raison une bonne ou une mauvaise chose ne changera rien. Le président Deby Itno sera mieux avisé de retenir 2 critères dans son choix. Il faudra que le poste soit occupé par une femme, peu importe sa provenance. Si c’est un homme, il faudra qu’il soit originaire de trois régions du Sud : le Moyen-Chari, le Logone-occidental et le Logone-oriental.

Pourquoi une femme? Ce choix marquera les esprits. Il sera historique. Et gagnera certainement l’adhésion des Tchadiens. Après tout, les hommes ont démontré depuis l’indépendance leurs capacités à ne pas parler des préoccupations quotidiennes des gens ordinaires. Une femme saura certainement mieux leur parler et les écouter. Après tout, la désignation d’une n’est que justice, elles sont majoritaires. Les frileux et les conservateurs diront que le Genre n’a rien à voir. Peut-être. Mais essayer ce qui ne l’a jamais été ne coûtera rien à personne.

Pourquoi un homme du Sud? Ce choix aussi n’est que justice. Il s’agit tout même de la vice-présidence. Ce n’est pas rien. Même symboliquement cela compte. Il faudra donc reprendra la vieille formule de la géopolitique. Une coutume politique qui a une vertu :  l’apaisement. Il faudra aussi qu’il soit un homme nouveau. Pas trop mêlé aux chicanes politiques. Ce choix aura aussi l’avantage de rabibocher le pays.

Bello Bakary Mana

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