À quelques semaines de la rentrée scolaire 2021-2022, certains parents modestes peinent à acheter les fournitures scolaires pour leurs enfants. Ils sont entre le marteau et l’enclume, car il faut inscrire les enfants et acheter les fournitures. C’est aussi la période faste pour les vendeurs. Reportage
Des cahiers, des livres et des sacs à dos étalés çà et là par les vendeurs en attendant des clients qui se font rares en cette période de préparatif de l’année scolaire 2021-2022. Pour permettre aux parents de préparer la rentrée de leurs enfants, certains vendeurs, aux étals et d’autres à la sauvette, proposent les fournitures de différentes qualités à la bourse de tous. Du riche, au plus modeste. Malgré les différentes stratégies de vente des marchands, les parents d’élève ne semblent pas intéressés pour le moment. Pour certains commerçants installés sur les grandes artères de la ville de N’Djamena, les clients viennent à compte goûte. Pour expliquer le manque d’engouement et ce qui préoccupe les parents, il faut noter que c’est d’abord les inscriptions et les réinscriptions.
Mbaïhodoum Herman, vendeur de livres, estime que les clients viennent, mais pas comme certaines périodes où ils sont débordés. Selon lui, en ce moment, ce sont les inscriptions des enfants qui sont leurs principales préoccupations, et qu’après les inscriptions et les réinscriptions, il est sûr qu’ils viendront acheter les fournitures scolaires. Il affirme que c’est depuis longtemps qu’il vend des fournitures scolaires, il a appris à comprendre les habitudes des parents. « Je vends des livres, des cahiers et autres gammes de matériels didactiques pour les élèves. Je suis convaincu qu’après les inscriptions et les réinscriptions, les parents viendront acheter. Il faut être patient », souligne le jeune vendeur. M. Mbaïhodoum Herman indique qu’en tant que bachelier et bouquiniste, il sait que ces dernières années, certains parents achètent, mais avec un léger retard. Il révèle que, parfois, il reçoit plus de 50 parents qui viennent acheter les livres et que les livres les plus demandés sont ceux de matières scientifiques, tels que les livres de sciences physiques et de mathématiques. À propos des prix des livres, le vendeur explique que pour le collège, les livres de matières scientifiques, les prix varient entre 3000 et 4000 F CFA et le lycée, c’est entre 4000 et 5000 F CFA. Même son de cloche pour Michel Kane, vendeur de cahiers et de sacs. Pour lui, c’est la période faste où les vendeurs de fournitures scolaires se frottent les mains. Il reconnaît que pour le moment, les parents s’occupent des inscriptions de leurs enfants. Il est confiant qu’ils reviendront acheter les fournitures.
Malgré la pression liée aux inscriptions et aux réinscriptions, certains parents estiment que c’est le moment de se sacrifier pour acheter les fournitures, avant que les commerçants n’augmentent les prix, surtout quand la demande sera élevée. Selon M. Kagdjim Soukom, militaire et père de 2 enfants, il faut se préparer en achetant certaines fournitures, avant que les vendeurs ne doublent les prix. Le soldat souligne qu’avec son maigre salaire, il est obligé d’acheter tôt. « Je viens chercher les fournitures scolaires pour mes deux enfants. Je ne peux pas attendre, sinon après les prix seront revus à la hausse. Je m’apprête petit à petit pour être prêt le jour J », dit-il. À quelques mètres de là, un autre client, un retraité d’une soixantaine d’années vient demander les prix. Il affirme qu’en tant retraité et responsable de la scolarité de ses petits-enfants, et en attendant la pension de retraite, il faut planifier.
Les mois d’août et septembre sont souvent considérés comme les mois les plus difficiles pour certains parents au revenu modeste. Toutes les dépenses arrivent en même temps : les inscriptions, les réinscriptions et l’achat des fournitures scolaires.
Jules Doukoundjé
La pluie du lundi, 30 août 2021 a presque envahi les boutiques aux abords du marché champ des fils. La voie bitumée entre les deux ailes du marché menant vers un poste de contrôle de la police est une marre d’eau, rendant la circulation difficile. Reportage.
C’était spectaculaire ce 30 août au quartier Amriguébé, dans le 5e arrondissement de N’Djamena, la capitale tchadienne. Les eaux de la pluie ont envahi les devantures des concessions et des boutiques aux abords de la voie goudronnée séparant le marché champ de fils appelé aussi marché de pièces de rechange des véhicules et les résidences. Véhicules, motocyclettes et piétons se disputent âprement le passage. Difficile de circuler avec tous les risques possibles. Voitures et engins à deux roues sont garés dans les eaux. Les boutiquiers et les résidents sont impuissants, les regards lointains dans le vide, chacun semble méditer sur la solution.
Certains boutiquiers disposent des sacs de sable pour leur servir de petit pont de fortune pour les permettre de passager. D’autres utilisent des véhicules usés pour rejoindre leurs échoppes ou la terre ferme. Une scène cocasse au centre de la capitale. Cette inondation est la conséquence de non-curage des caniveaux par la ville.
Les résidents et les boutiquiers aux abords soutiennent que cette situation qui se répète chaque année en saison pluvieuse est déplorable. Ils demandent à la Mairie de prendre ses responsabilités. Au-delà de la responsabilité de la Mairie, l’incivisme de la population n’est pas à écarter, lance un autre habitant sous le sceau de l’anonymat. Pour Abdoulaye Seïd, riverain, « La Mairie de la ville de N’Djamena fournit certes des efforts dans les curages des caniveaux, mais la plupart des canalisations des voies publiques ne valent rien du tout. Elles ne sont pas profondes. Elles sont aussi mal construites.» Selon lui, la Mairie devrait donner des amendes aux résidents et aux commerçants qui jettent des ordures dans les caniveaux, c’est une pratique qui fait reculer tout le monde.
« Voyez c’est lamentable, on est entouré d’eau. Je suis sans mots. Si une autre grosse pluie tombe encore, quel sera notre sort », affirme en colère un boutiquier du marché.
Moyalbaye Nadjasna
Bientôt c’est la rentrée scolaire 2022. A N’Djamena, la capitale tchadienne, certains établissements scolaires privés amorcent le processus déjà des inscriptions et des réinscriptions. Mais l’ambiance est morose. Le cœur n’y est pas. C’est du moins le constat fait par nos reporters sur le terrain dans quelques lycées et collèges privés des quartiers nord et sud de la ville. Reportage.
Après une pluie de quelques millimètres tombée ce matin du 30 août 2021 à N’Djamena, le climat était doux. Il était 10h lorsque la rédaction a sillonné quelques établissements scolaires privés de la capitale tchadienne pour s’enquérir des préparations de la prochaine année scolaire.
Premier arrêt : Lycée et collège Fort-Lamy, cet établissement scolaire est situé sur la rue de 40 m, Avenue N’garta Tombalbaye, dans le 3e arrondissement. M. Ibrahim Mahamat Iguémir en est le Proviseur. Il nous reçoit amicalement. Après les chaudes poignées de mains, nous déroulons l’objet de notre visite : « nous venons nous enquérir des préparatifs de la rentrée scolaire 2022. » Selon lui, son établissement se conforme toujours au calendrier scolaire du ministère de l’Éducation nationale. « Nous avons prévu le début des réinscriptions, le 1 septembre 2021. Pour les nouveaux élèves, leur admission dans notre établissement se fait par voie de tests. Nous avons reçu déjà plus de 200 dossiers pour le recrutement des nouveaux élèves. Le test concerne le 1er et le 2d cycle avec quelques matières qui vont être affichées à la veille », explique-t-il. Le proviseur affirme que son école fait la politique de l’excellence prônée par les autorités. Pour lui, seuls ceux qui méritent et définitivement admis au test qui seront inscrits. M. Ibrahim Mahamat Iguémir souligne que les parents d’élèves sont leurs partenaires privilégiés. « Nous faisons ce qui est en notre pouvoir pour assurer un meilleur encadrement de nos élèves pour ne pas décevoir les parents qui nous font confiance. Après le test et une fois le résultat affiché, nous ne prendrons aucun enfant. Nous délivrons une liste des matières au programme aux parents afin de leur permettre d’acheter les fournitures de leurs enfants », soutient-il. Il informe que mêmes les chargés de cours sont recrutés par voie de test, sous l’autorité du Conseil des sages. Il ajoute que son établissement travaille avec le programme réactualisé et déroulé par le ministère de tutelle. « Par exemple cette année nous avons présenté 355 candidats de toutes séries confondues au baccalauréat . 245 sont déclarés admis d’office, soit 70,49% de taux de réussite ».
Deuxième arrêt : Lycée et Collège Baba Lagré, situé à gauche de la rue de 40 m. Nous rencontrons le fondateur, M. Lagré Moussa Allamine. Il déclare que, c’est peut-être prématuré de parler de la prochaine rentrée, avant de préciser qu’ils ont plutôt, opter pour l’instant à une remise de niveau de leurs candidats admissibles à la seconde session du Baccalauréat. « Nous voulons organiser des petites séances des travaux dirigés en faveur de nos candidats admissibles au baccalauréat. Cela va leur permettre d’être prêts pour aborder la seconde session fixée le, 4 septembre 2021 par l’ONECS », indique-t-il. Il soutient que son administration a convoqué quelques enseignants, surtout pour les matières de base pour voir ensemble ce qu’il y a lieu de faire. Ils entendent maximiser la chance de ces jeunes pour leur admission définitive à cette seconde session. « Après cette phase, nous allons nous consacrer totalement aux réinscriptions et inscriptions. D’ailleurs nous détenons des fiches avec tous les renseignements inhérents aux inscriptions et réinscriptions que nous mettons à la disposition des parents d’élèves. Sinon c’est timide comme vous le remarquez », dit-il.
Troisième et dernier arrêt : Lycée et collège des Assemblées chrétiennes au Tchad, situé au quartier Ardep-djoumal, dans le 3e arrondissement. Le censeur M. Mbermbaye John attend la rédaction avec aplomb. Il est l’homme clé qui détient toutes les informations scolaires de son établissement. « Une année se termine, une autre année commence automatiquement. Nous avons déjà fait la planification pour les inscriptions et réinscriptions pour démarrer, le 2 août, mais il y avait une coïncidence avec le déroulement du baccalauréat », affirme-t-il. Selon lui, son établissement a bel et bien lancé les inscriptions et les réinscriptions, mais c’est difficile. Ce mois, dit-il, est un mois difficile, les parents d’élèves disent que leurs finances sont mal en point. « Nous disons aux parents de réserver les places de leurs enfants et s’acquitter plus tard des frais d’inscription, mais ils semblent ne pas comprendre », dit-il. M. Mbermbaye John affirme qu’il n’y a pas d’engouement, cela posera des problèmes d’encombrement plus tard.
Entre temps dans les établissements privés l’ambiance en ce qui concerne les couturiers est tout à fait différente. Ils travaillent d’arrache-pied pour confectionner les tenues scolaires dans chaque établissement qui les recrute. Dans les établissements publics par contre, rien à signaler sauf les administrations qui s’activent pour la seconde phase des épreuves du baccalauréat 2021.
Moyalbaye Nadjasna
Le président d’honneur de la ligue tchadienne des droits de l’homme (LTDH), et représentant de la fédération internationale des droits de l’homme (FIDH) auprès de la communauté économique et monétaire d’Afrique centrale (CEMAC) Dobian Asngar se dit consterné par le comportement des responsables de la LTDH qui n’arrivent pas à résoudre les problèmes internes de l’institution et de les exposer. Il tente ici de faire la lumière sur ce qui gangrène l’institution qu’il a eu à diriger. Entrevue.
La Ligue tchadienne des droits de l’homme (LTDH) traverse une crise sans précédent depuis sa création. Un problème de leadership et d’ego que les responsables de l’institution tchadienne pour la défense des droits humains n’ont pas su gérer depuis plus d’un an. Après une médiation par le Conseil d’Administration (CA), les membres du Conseil d’orientation et de contrôle (COC) de l’institution ont décidé de mettre fin à ces querelles inutiles qui gangrènent la LTDH. Les 11 membres que constitue le COC ont décidé d’une manière collégiale de suspendre le président, M. Max Loalngar.
Pour le président d’honneur, Dobian Asngar, c’est déplorable le comportement des responsables de la LTDH. Il estime que c’est irresponsable de la part des responsables de l’organisation d’exposer les problèmes internes de l’institution sur les réseaux sociaux. « Un problème d’une organisation se règle dans l’organisation. Un problème de famille se règle en famille. Ce n’est pas dans la rue », martèle le président d’honneur de la LTDH. Selon lui, les responsables n’ont pas un petit grain de respect pour eux-mêmes et pour la population qu’ils sont censés défendre.
Au sujet de la suspension du président de la LTDH, M. Max Loalngar, Dobian Asngar souligne que, c’est un cumul de problème d’ego et d’irresponsabilité qui ont abouti à cette situation. « Les conseillers du COC ont fait un rapport de médiation de tout le personnel jusqu’aux gardiens. Nous avons dégagé des conclusions en disant que celui qui gère ne respecte pas les procédures et que celui qui a la responsabilité de contrôler contrôle », explique-t-il. L’ancien président et président d’honneur de la LTDH affirme que depuis 1 an, après le congrès qui a élu M. Max comme président, ce dernier n’a pas pu respecter ni appliquer les actes qui ont été pris par le congrès. A son avis, les réunions statutaires qui sont prises par les textes du CA et les réunions du COC, dont lui-même a présidé n’ont pas été prises en compte, « c’est une faute grave ». Pour éclairer la lanterne des Tchadiens, Dobian Asngar soutient que le président suspendu n’écoute personne. Pire, il dit n’avoir pas confiance en certains membres du COC, en les qualifiant des gens infiltrés, alors qu’ils sont élus comme lui. « Quand vous êtes contre tout le monde et que la maison est en train de tomber, et vous ne prenez pas vite des décisions pour sauver la situation, qui doit porter la responsabilité », s’interroge-t-il. Le défenseur des droits humains affirme que le président de la LTDH a refusé deux fois, de participer à la présentation du rapport et que ce sont les autres membres qui ont assisté. Il évoque aussi le manque de sagesse, en se répandant partout sur les réseaux sociaux.
La caisse de la LTDH est vide
Outre le manque d’écoute et de prise de décisions qui sont en quelque sorte le péché qu’a commis M. Max Loalngar, il leur serait reproché, lui en tant que président et les autres responsables, de ne pas pouvoir chercher des financements pour faire fonctionner normalement la LTDH. Les querelles des responsables ont considérablement affecté l’état financier de la structure. Le personnel n’est pas payé, sans occulter le cumul des arriérés de loyer du local. Pour trouver une solution idoine, Dobian Asngar propose la tenue d’un congrès extraordinaire dans un bref délai. Cela va permettre de dénicher les vrais responsables et de les sanctionner. Selon lui, c’est seulement après ce congrès extraordinaire que l’on pourra mettre sur pied un nouveau bureau. Toutefois, il relève le manque de moyen financier qui handicape l’organisation du congrès extraordinaire pour sauver la LTDH.
Jules Doukoundjé
Les victimes de crimes et de répressions de l’ancien président Hissène Habré se sont rencontrées à huis clos ce jeudi 26 août au siège de leur association située au quartier Chagoua, dans le 7e arrondissement de la ville de N’Djamena. L’objectif de cette rencontre avec leurs avocats est de s’enquérir de la mort de l’ex-président au sujet de leurs indemnisations. Reportage.
Des centaines de victimes, composées des femmes et des hommes, de l’ancien dictateur tchadien, Hissène Habré se sont réunies ce jeudi après-midi au siège de leur association, située sur l’avenue Jacques Nadingar, au quartier Chagoua, dans le 7e arrondissement de la ville de N’Djamena. Le mot d’ordre de cette rencontre est d’avoir plus d’information avec leurs avocats et conseillers juridiques pour la suite de leurs indemnisations. Après la mort de l’ex-président Hissène Habré, décédé à Dakar, au Sénégal de suite de covid-19, les victimes ont de position mitigées sur le décès de celui qui a été pendant longtemps à l’origine de leurs souffrances.
Pour le secrétaire général de l’association des victimes de crimes et de répressions de Hissène Habré (AVCRHH), Koumato David, la mort est un destin pour tout homme. Et la mort d’Hissène Habré n’entame en rien à leur lutte. A son avis le but de leur lutte est d’arriver à la réparation et aux indemnisations. Pourtant jusque-là, rien n’est fait. Bien qu’ils ont reçu à le condamner à perpétuité. Koumato David précise que le fait que l’ex-président soit condamné à perpétuité est déjà une grande victoire pour les victimes, avant d’ajouter que ce serait plus encore, quand toutes les victimes seront indemnisées. « Nous exhortons l’Union africaine (UA) qui est à la manœuvre de tous les jugements, avec le gouvernement sénégalais et les autorités tchadiennes de mettre leurs efforts ensemble pour indemniser au plus vite les victimes qui sont en train de mourir ».
Selon lui, plus de 300 victimes sont déjà mortes sans être indemnisées et qu’il faut faire vite pour que celles qui sont encore en vie puissent rentrer dans leur droit. Ce dernier précise que les victimes ne quémandent pas, ils réclament leur droit. Il rappelle que sur les 7 000 victimes qui constituent l’association, plus de 300 sont déjà mortes, « cela n’est pas normal de les traîner ». Au sujet de la mort de Hissène Habré, il affirme que l’ex-dictateur est condamné à perpétuité donc il doit mourir en prison. Et rapatrier ou pas la dépouille n’est pas leur problème. Le problème c’est le gouvernement de transition qui a dit qu’ils peuvent rapatrier son corps si sa famille le veut et qu’ils ne s’opposent pas.
Le SG de l’AVCRHH, souligne que le fait que le gouvernement de transition confirme que la dépouille de l’ex-président n’aura pas des honneurs est une satisfaction pour les victimes. « Ce qui nous préoccupe, c’est nos indemnisations. Le reste, ce n’est pas notre problème, sauf que les choses restent à moitié c’est cela notre préoccupation », explique Koumato David.
Même son de cloche chez les victimes
Autre réaction dans le même sens. Le coordonnateur de l’AVCRHH, Ousmane Abakar Tahir, soutient que le décès de Hissène Habré n’est pas lié à l’indemnisation. Selon lui, les victimes ont gagné tous les procès contre l’ex-dictateur, et que cela ne les inquiète pas. Il révèle que leurs indemnisations sont évaluées à plus de 75 milliards de f CFA. Et la moitié doit être versée par l’État tchadien. De l’avis de Moctar Nganansou, une victime, Hissène Habré est un homme, donc il est mortel, et qu’il est mort comme toutes les victimes. Ce dernier regrette que son bourreau meure de sitôt, avant de préciser qu’il ne jubile pas de sa disparition, mais qu’il aurait souhaité que l’ex-président purge sa peine jusqu’au bout. Pour cette veuve et victime qui s’exprime sous couvert de l’anonymat, les femmes victimes sont très fatiguées, il faut que l’État tchadien et l’UA leur payent leurs droits. Selon elle, le procès est clos depuis 5 ans et l’horizon est toujours sombre. Entre temps les victimes meurent sans être indemnisées, « cela a trop duré ».
Aux dernières nouvelles, les épouses de l’ancien président ont décidé que la dépouille de leur mari soit inhumée au cimetière musulman de Yoff, en terre sénégalaise. Au moment de publier cet article, la levée du corps a eu lieu.
Jules Doukoundjé
Après quelques jours des vacances, certains établissements scolaires surtout privés à N’Djamena organisent des cours de vacances appelés communément cours d’été. Que visent ces cours? Nos reporters sont allés rencontrer enseignants et étudiants. Reportage.
Raïssa Marie, 14 ans, habite au quartier Moursal dans le 6e arrondissement de N’Djamena, capitale tchadienne. Chaque lundi, mercredi et jeudi, elle parcourt 1 kilomètre avec ses camarades pour venir suivre les cours de vacances appelé encore cours d’été au Lycée et Collège Adventiste. Ce mercredi 25 août, elle était en train de suivre le cours de physique-chimie, « nous avons commencé les cours depuis le 12 juillet et cela fait déjà 45 jours. J’apprécie les cours d’été, je suis satisfaite même si c’est en peu de temps. J’ai appris des choses qui vont m’avantager à la prochaine reprise », confie-t-elle. Elle remercie ses parents et ses enseignants pour les bonnes dispositions prises par les uns et les autres. La jeune fille plaide auprès d’autres parents d’élèves afin d’envoyer leurs enfants dans les cours de vacances. « Il y a toujours quelque chose à gagner », dit-elle.
Le chargé de cours de physique-chimie M. Alafi Allahdi estime pour sa part qu’après 6 semaines de cours, il a fait une évaluation et le niveau est encourageant. « Certes, les vacances sont faites pour que les élèves après 9 mois de cours se reposent. Mais à mon avis normalement après 1 mois de repos, les parents doivent envoyer leurs enfants pour suivre les cours de vacances qui ne durent que 45 jours », affirme, l’enseignant. Il précise que ces cours sont indispensables parce qu’ils rehaussent un tant soit peu le niveau des enfants et les prépare à la reprise des cours.
M. Mbang Émile, directeur des cours de vacances au Collège Adventiste, affirme que les cours ont commencé le 12 juillet et finissent le 25, mais c’est le 31 août que tout va définitivement finir. Selon lui, il y a eu 60 élèves tous cycles confondus. Il explique que depuis le début des cours jusqu’à maintenant, la progression pédagogique est appréciable. Il précise que les élèves qui sont les plus concernés sont ceux des classes du premier cycle et du second cycle. Pour le second cycle, il s’agit des élèves de seconde et première scientifiques, explique le directeur. Concernant la raison d’être des cours de vacances, elle est motivée par les évènements tels que le covid-19, l’instabilité sécuritaire et les grèves répétitives que le pays a subis depuis deux ans. Selon lui, ces évènements ont impacté négativement le niveau des élèves. « Il ne faut pas que les parents négligent les cours d’été. Ces cours sont importants pour les enfants même si cela se passe dans un temps court. Nous enseignons 5 matières : le français, l’anglais, les mathématiques, la physique-chimie et la biologie. Je trouve l’essentiel du programme », détaille M. Mbang.
Nous avons sillonné plusieurs autres établissements scolaires, mais la plupart ont déjà fini avec les cours d’été, ils s’attellent aux inscriptions et aux réinscriptions pour l’année scolaire 2021-2022.
Moyalbaye Nadjasna
L’huile d’arachides est la plus prisée par la plupart des ménages modestes de la capitale tchadienne. Mais en cette période de pluies, cette huile devient de plus en plus rare et cette rareté a fait grimper le prix. La hausse du prix d’huile d’arachides inquiète bon nombre de ménages modestes. Reportage.
La rareté de l’huile dans les marchés de la capitale, N’Djamena, met beaucoup de ménages dans des difficultés inexplicables. Ce manque d’huile a fait flamber le prix et le panier de la ménagère est atteint. Les consommateurs se plaignent de cette hausse des prix. Pour justifier cela, certains commerçants expliquent que ce manque serait lié à l’augmentation des oléagineux tels les arachides et le sésame. L’huile est le principal ingrédient pour la cuisine, la hausse de son prix met en difficulté et voire modifie même les habitudes de certains modestes foyers. Certains vendeurs affirment que ce sont les taxes douanières qui seraient la cause de cette flambée. Pour répondre au problème, ils exhortent les autorités à revoir leur copie en annulant purement et simplement ces taxes. Les marchés de la capitale sont bondés d’huiles importées des pays voisins en cette saison de pluie, alors que les femmes ont pour préférence l’huile d’arachides produite localement.
Pour Alhaji Adam Yabisse, marchand, rencontré au marché à mil, dans les deux arrondissements de la commune de N’Djamena, il y’a plusieurs qualités dans les marchés et en abondance, mais les clientes préfèrent acheter l’huile d’arachide locale. Selon ce vendeur, le sac d’arachides coûte cher et cela a affecté le prix. Il conseille à ses clientes de s’approvisionner d’autres huiles importées en attendant la période faste des arachides. Pour soulager les clients, certains vendeurs proposent leur proposent l’huile de palme et bien d’autres marques d’huiles importées. Outre la hausse de prix d’huile d’arachides dans les marchés, les consommateurs se plaignent aussi de la hausse de prix de denrées des premières nécessités.
Amina Ali affirme que c’est depuis plus de 10 ans qu’elle prépare à base d’huile d’arachides, mais la hausse de prix a modifié son habitude. La jeune dame souligne qu’avant, elle n’arrivait pas à gérer, mais qu’avec cette rareté et la hausse de prix, elle est contrainte de revoir sa gestion. Nénodji Madjiré institutrice, a quant à elle demandé aux foyers modestes de se rabattre sur le beurre de Karité, une excellente huile. Pour l’institutrice, l’huile de karité est aussi meilleure que l’huile d’arachides. Elle exhorte les consommateurs à réduire la quantité d’huile quand ils cuisinent.
En attendant la période d’abondance d’arachides, les clients et les vendeurs d’huiles d’arachides devraient s’évertuer pour trouver le juste milieu. Et pour mettre fin à cette situation. Les autorités publiques sont appelées à arbitrer afin de trouver de solutions idoines aux ménages modestes qui croulent sous la cherté de vie.
Jules Doukoundjé
La Haute Autorité des médias et de l’Audiovisuel (HAMA) et les responsables des médias tchadiens ont échangé ce, 25 août 2021 dans un hôtel de la place, sur « le rôle et les missions des médias dans le processus du Dialogue national inclusif (DNI). » A l’ouverture des assises, quelques organisations de la société civile, des organisations internationales, des corps diplomatiques, des députés et le ministre d’État chargé de la Réconciliation et du Dialogue national, Acheikh Ibni Oumar, représentant le Premier ministre de la Transition étaient présents. Reportage.
Selon la feuille de route de la Transition, le Dialogue national inclusif devrait se tenir entre les mois de novembre ou décembre 2021. M. Laoro Gondjé, Secrétaire général de la Haute Autorité des médias et de l’Audiovisuel (HAMA), affirme qu’avoir fait un constat par rapport aux publications de certains organes de presse, d’ articles à la limite des propos haineux, après la disparition tragique du Président Idriss Deby Itno, le 20 avril dernier. Il précise que de tels écarts de comportement professionnel peuvent affecter dangereusement la cohésion nationale. Pour être prudente dit-il, la HAMA initie ces assises de réflexion et d’échange afin d’aider les médias à plus de responsabilités dans le traitement des informations avant, pendant et après le Dialogue national. M. Laoro Gondjé affirme que, la HAMA n’a pas seulement pour mandat de garantir la liberté de l’information et de la communication au Tchad, mais elle doit aussi et surtout veiller au respect du code de l’éthique et de la déontologie du métier. « L’objectif de cette formation est de renforcer les capacités professionnelles des journalistes et les mobiliser autour du dialogue à venir afin de disposer des informations fiables et crédibles, susceptibles de modifier la perception du vivre ensemble des Tchadiens », note-t-il.
M. Dieudonné Djonabaye, président de la HAMA, dans son intervention, signifie que, le Président du conseil militaire de transition (PCMT) Mahamat Idriss Deby invite la presse à participer activement au processus transitoire, afin de favoriser le vivre-ensemble au Tchad. Il ajoute que les médias doivent éviter les articles qui poussent à la haine et à la violence. Pour le président de la HAMA, les journalistes doivent contribuer à la réussite du DNI. M. Dieudonné Djonabaye déclare que, la liberté de la presse et ses activités sont encadrées par les textes et lois. D’après lui, si la HAMA met systématiquement de la rigueur dans la régulation des activités des médias au Tchad, un grand nombre de presses disparaîtrait. « Nous tenons à avoir une presse diversifiée et plurielle, mais rigoureuse et responsable. Les médias doivent faire preuve de professionnalisme et éviter de jeter de l’huile sur le feu ni être source de division », renchérit le président de la HAMA.De plus, il soutient qu’une information exacte et vérifiée, bien équilibrée, donne la parole à tous les acteurs. Il insiste sur le principe d’objectivité de l’information au cours du DNI, gage de la cohésion nationale. Selon lui, les journalistes doivent relever dans leurs informations, les avancées et les aspects porteurs d’espoir avant, pendant et après le dialogue aux Tchadiens. Il termine en signifiant qu’après le DNI, suivront les périodes électorales qui sont toutes des moments cruciaux et la presse doit se montrer professionnelle.
Le ministre d’État chargé de la Réconciliation et du Dialogue Acheik Ibni Oumar, a représenté le Premier ministre de transition, Pahimi Padacké Albert.
Il apprécie le thème choisi par la HAMA pour cette rencontre. Selon lui, cette réflexion est non seulement celle des médias, mais de tous les Tchadiens. « Tous les Tchadiens doivent faire preuve d’ouverture d’esprit afin de contribuer ensemble à rompre avec le cycle infernal des conflits meurtriers qui affectent négativement notre pays. Les médias sont les acteurs clés pour la promotion de la paix et de l’unité nationale », dit le ministre Acheik Ibni.
Le représentant du Premier ministre note que les médias doivent être au-dessus de la mêlée afin d’influencer positivement le déroulement du dialogue à venir.
Moyalbaye Nadjasna
Le Quartier Zafaye Est, dans le 8e arrondissement de la capitale tchadienne, N’Djamena, et ses alentours sont plongés sous les eaux ce 22 août dans la nuit. Cette pluie sectorielle constatée ce dernier temps dans la capitale tchadienne a causé d’énormes dégâts. Ialtchad s’est rendu sur le terrain pour constater. Reportage.
Quartier Zafaye Est, 8e arrondissement de N’Djamena capitale tchadienne. Difficile de franchir la voie principale qui mène vers le village Gaoui où se trouve l’un des sites historiques des Sao, ancêtres des Tchadiens. Cet axe revêtu d’un vieux bitume avec des nids de poule à perte de vue est un véritable parcours de combattant. Véhicules, motocyclistes et piétons négocient avec beaucoup de peine leur passage.
À gauche sur la route menant à Gaoui, c’est le carré 23. Youssouf Idriss, un habitant victime des eaux de la pluie se démène les pieds dans l’eau. Pèle en main, cet homme d’environ 40 ans tente de frayer un petit canal pour faire écouler l’eau. Selon lui, c’est depuis 6h du matin qu’il canalise l’eau. « Nous n’étions que 3 personnes, plus le Chef de carrée, à travailler, les autres nous regardent travailler alors que nous sommes tous victimes. C’est un comportement déplorable. Nous sommes en train de voir avec le chef de carré s’il faut ne passer de concession par concession pour éveiller la conscience citoyenne des habitants de notre quartier », confie-t-il. Youssouf Idriss affirme que cette saison est pénible, avant de rappeler que même, l’année dernière la Mairie n’a rien fait, c’est plutôt la population qui s’est cotisée pour mettre un peu de terre sur la transversale qui longe leur quartier.
Selon le chef de carré M. Mahamat Nour Hassan, la pluie d’hier leur a mis dans une grande difficulté. « Cette marre que vous voyez a débordé et depuis hier nuit et les maisons aux alentours sont inondées. Depuis hier nuit nous sommes au four et au moulin. Nous demandons aux autorités communales de s’occuper un peu des routes et remettre en état les canaux secondaires », dit-il. D’après lui, son carré n’est pas loin du grand canal, il suffit simplement que la Mairie les aide à drainer l’eau et la population sera mise à l’abri.
Sur l’axe principal, un usager très fâcheux se lâche, « cet axe est bitumé et dégradé depuis un moment. La mairie n’a rien fait. Maintenant, voyez ce qui se passe, c’est lamentable. Je peux dire que c’est l’axe principal et incontournable pour aller au site des réfugiés et voir village Gaoui à environ une dizaine de kilomètres. Sommes-nous réellement dans une capitale? »
M. Ahmat Abakar Issa résident du quartier Zafaye Est au carré 37 et son chef de carré Adam Ahmat Doungous, témoigne, « Parlant de la pluie d'hier et des dégâts, les images que vous avez faites parlent. Elles montrent l’enfer que les résidents ont vécu. Les voies secondaires, les domiciles, les biens et matériels se sont retrouvés dans l’eau », explique-t-il. M. Ahmat Abakar Issa demande l'intervention de l'État et la contribution de chacun pour construire des canalisations. Il plaide aussi pour le bitumage des rues principales afin de soulager les habitants du quartier Zafaye Est.
Moyalbaye Nadjasna
Le Conseil Militaire de Transition (CMT) a décidé de retirer 600 soldats sur les 1200 déployés dans la zone dite des 3 frontières : Mali, Niger, Burkina Faso. Pour certains, c’est une surprise. Pour d’autres c’est une décision inévitable depuis la mort du Maréchal président Idriss Deby Itno. Alors quelles sont les raisons de ce retrait? Est-ce une bonne nouvelle?
D’abord, les raisons officielles. Selon le ministre de la Communication, porte-parole du gouvernement M. Abdramane Koulamallah il ne s’agit pas d’un retrait, mais plutôt d’un redéploiement stratégique. Sur les ondes de RFI, M. Koulammallah s’est démené pour expliquer que ce retrait n’est qu’un simple redéploiement. C’est, dit-il, un non-évènement. La rédaction a contacté le ministre pour éclaircissement. Il affirme même que ce redéploiement était prévu depuis le dernier sommet du G5 Sahel. Il a avancé aussi d'autres raisons : le fait que les forces tchadiennes dans cette zone étaient des forces trop lourdes et trop nombreuses. Conséquences : impossible de constituer un nombre exact de bataillons. Surtout que la lutte contre les terroristes est devenue asymétrique. Une lutte qui nécessite des troupes légères et mobiles contrairement au déploiement tchadien, qui constitué de blindés, s’est avéré inefficace. Les jihadistes, eux, ont opté pour une guerre de mouvement, pas pour une guerre de positionnement. Difficile alors pour les Tchadiens en intervention extérieure d’être en opération mobile tout le temps. Sinon la guerre en mouvement est une spécialité de l’armée tchadienne.
Ensuite, les raisons officieuses. Selon les observateurs, derrière ce retrait il y a des raisons stratégiques qui touchent à la sécurité interne du pays. Du temps de son vivant, le Maréchal Deby Itno avait déjà montré quelques signes d’agacement. La présente décision du CMT est stratégique. Elle concerne la sécurité interne et la consolidation de la transition contre les menaces qui s’amoncellent, quoi qu’on dise, aux frontières. Entre autres: à la frontière libyenne avec la rébellion du Front pour l’Alternance et la Concorde au Tchad (FACT). Au sud avec la Centrafrique. Et au centre avec la nébuleuse Boko Haram qui malgré son affaiblissement déstabilise la zone du Lac Tchad et fait perdre à l’armée tchadienne des valeureux soldats.
Enfin, les raisons objectives. Il était temps de partir. Il était temps depuis fort longtemps. Peut-être pas toute la troupe d’un coup, mais ce retrait est une bonne chose. Rien ne sert de faire semblant. Si le Tchad s’amusait à faire le bilan de cet engagement au Mali et dans la zone dite de 3 frontières il n’y aura au tableau que des morts, des blessés, des veuves et des orphelins sans ressources. Oubliés. Le Tchad n’a rien gagné en intervenant tous frais payés dans une région pas toujours reconnaissante. Pourtant le Tchad est aussi, sinon plus pauvre que le Mali et ses voisins. Plus pauvre par exemple que la Côte-D’Ivoire, le Sénégal, etc. Il est bien vrai que la question du terrorisme est importante, mais le Tchad ne peut se sacrifier, sacrifier sa jeunesse pour des pays qui ne sont pas ou peu en première ligne. Il aurait été mieux pour le Tchad d’adopter la stratégie mauritanienne qui consiste à assurer sa sécurité interne et celle de ses frontières. Pourtant c’est un pays géographiquement au milieu de cette guerre d'usure. Une guerre sans fin comme celle des talibans afghans.
Le rapprochement est un peu hasardeux, mais ce qui se passe dans l’espace G5 Sahel, surtout dans les pays dits « les maillons faibles » : le Mali, le Niger et le Burkina, risque d’être long. Et la transformation de cette zone en un « Sahélistan » est de plus en plus possible. Personne ne fera la guerre à la place des armées de ces pays. Et le Tchad ne peut continuer à envoyer ses soldats pour une guerre sans issue. Il est un temps où il faut s’occuper de soi après s’être occupé des autres. Le Tchad en est là. En cette phase de transition, le pays est à la croisée des chemins. Et cette décision est un bon pas dans la bonne direction. C’est donc une bonne chose.
Bello Bakary Mana