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Les avocats tchadiens viennent de suspendre leur grève déclenchée il y a quasiment un mois suite à l'arrestation des personnes et surtout leurs confrères lors de la marche autorisée, le 14 mai dernier. Une décision commune prise à l'issue d'une Assemblée générale organisée ce mercredi, 8 juin 2022 au centre culturel Al-Mouna de N'Djamena, Tchad. Reportage.

Le Bâtonnier Me Dionro Laguerre Djerandi à la sortie de l'Assemblée générale, déclare qu'ils ont cessé le travail suite à l'arrestation des personnes après la marche du samedi 14 mai dernier. « L'audience foraine a fini par une condamnation d'un an avec sursis. Nous nous sommes retrouvés en Assemblée générale pour évaluer tout cela. Unanimement, nous avons décidé de la suspension de la grève en espérant que la Cour d'Appel qui sera saisie et qui a un pouvoir d'évocation entende le droit et que cette décision de condamnation soit purement et simplement annulée », dit le Bâtonnier. A son avis, cette condamnation n'a pas sa raison d'être. Il estime que même si c'est une condamnation avec sursis, c'est une condamnation. Autrement, le problème n'est pas entièrement résolu, insiste-t-il.

Me Laguerre soutient qu'ils reprennent leurs activités en attendant d'attaquer cette affaire-là à la Cour d'Appel pour son annulation. « De notre évaluation, il se dégage que notre revendication ultime n'a pas été prise en compte. Nous avons demandé une libération pure et simple de ces personnes, car un procès ne devait pas avoir lieu, mais il a fini par avoir eu lieu », dit l'avocat. Il déplore les conditions d'arrestations de ces personnes et toute la procédure qui a suivi jusqu'au procès en audience foraine à Moussoro.  Pour le Bâtonnier  ce n'est pas une surprise. D'après lui, ils ont eu plusieurs échanges, mais si au niveau du parquet ils apprennent que les instructions leur venaient d'un haut niveau, rien de surprenant.

Toujours selon Me Laguerre, ce sont les juges de siège qui sont indépendants  qui ont rendu cette décision. Au regard du droit  dit-il, ils auraient pu faire autrement. « Mais la question de leur indépendance, vous le savez que l'indépendance du pouvoir judiciaire pose problème. C'est un problème réel dans ce pays. Notre lutte de chaque jour est que le pouvoir judiciaire soit véritablement indépendant de l'exécutif et du législatif. A l'égard des juges, nous disons que l'indépendance judiciaire s'arrache », affirme l'avocat. Les magistrats, soutient-il, doivent eux-mêmes  être déterminés afin de faire œuvre utile, d'être plutôt esclave de la loi et non de quelqu'un ou d'une institution. Le Bâtonnier pour se résumer affirme que tous les acteurs judiciaires doivent s'impliquer dans cette lutte pour faire rayonner la justice tchadienne. « Pour nos confrères avocats, en attendant que la décision ne soit appréciée par la cour d'Appel, ils peuvent effectuer normalement leurs activités d'avocats », clarifie-t-il.

Moyalbaye Nadjasna

Classé avant dernier pays au monde en termes d’accès à l’énergie par la Banque Mondiale (BM) en avril 2021 avec 11,8%. Le Tchad fait partie des pays où le délestage intempestif est récurrent. La population a très peu accès. Les secteurs public et privé  en sont victimes. Les hôpitaux considérés comme des lieux sensibles où l’électricité devrait être en permanence sont aussi touchés. L’équipe de Ialtchad Presse est allé dans quelques hôpitaux et cliniques de la capitale pour le constat. Reportage.

Si hier la population et quelques institutions publiques et privées sont dans le noir, le délestage contamine même les services hospitaliers. Le constat est amer. De l’hôpital polyclinique Chérif Kachallah Kasser en passant par l’hôpital de l’amitié Tchad-Chine et la Clinique Médico-chirurgicale Al-Shifa, personnels et responsables se plaignent.

À l’hôpital polyclinique Chérif Kachallah Kasser, situé dans le 3e arrondissement de la capitale tchadienne, sis au quartier Ambassatna il est 10h Personnels infirmiers, médecins, responsables administratifs et patients tous étaient présents, mais sans énergie électrique et dans l’obscurité. La plupart des administrateurs de l’hôpital utilisent l’éventail ou un bout de papier pour se rafraîchir. Les patients, impuissants, sont abandonnés dans la chaleur des salles ou dans la cour.

Pour Banterné Nojie, sage-femme et responsable, plus de quatre (4) semaines que l’hôpital souffre de délestage. La SNE (Société Nationale d’Électricité) ne fournit plus de l’énergie dans cette structure sanitaire, dit-elle. Pour elle, la maternité demande de l’électricité pour son bon fonctionnement. «En cas de saignement, il faut impérativement un bilan auprès du laboratoire afin de bien prendre en charge la patiente, mais sans l’électricité nous avons un sérieux problème et ça risque de mettre la vie de la patiente en danger », affirme-t-elle. Quant au Médecin en Chef de cet hôpital, Dr Tidjani Abou Nassib, le délestage est devenu très fréquent. Il ajoute aussi que cela un impact sur la prise en charge des patients et ralenti les travaux au sein de l’hôpital. Il souligne que « le laboratoire, l’échographie, la maternité, la réanimation, l’oxygène… ne fonctionnent qu’avec l’énergie. Sans électricité, la vie des patients est en extrême danger ».  Pour pallier au délestage, Dr Tidjani Abou Nassib dit qu’un groupe électrogène a été mis en marche, mais ce n’est pas suffisant, « avec la chaleur il faut un temps de repos pour le groupe, il faut du gasoil… ce n’est pas du tout facile sans électricité », dit-il.

À l’hôpital de l’amitié Tchad-Chine situé dans le 8e arrondissement de la capitale derrière l’ancien hôtel Kempinski, il est 11h. Les bourdonnements des groupes électrogènes envahissent presque tout l’hôpital. Il y a délestage. La majorité des groupes sont en marche et alimentent une grande partie de cette institution hospitalière. Selon Moussa Adoum, technicien de laboratoire, le délestage est devenu récurrent, mais la direction de notre institution a pris des dispositifs nécessaires en installant des groupes électrogènes automatiques en subdivisant par secteur. Il soutient que délestage à un impact négatif dans leurs travaux de laboratoire « quand il y a délestage, en labo, nous allons reprendre tout à zéro et nous perdons des réactifs, ce qui bloque la coordination du travail », martèle-t-il. Pour Dr. Allarassem Diaz Kody, technicien supérieur en Anesthésie Réanimation, le délestage a un impact négatif sur le résultat de leur travail. Il dit que le bloc opératoire, la chirurgie, l’anesthésie nécessitent de l’énergie. « Lorsqu’il y a délestage en pleine chirurgie, les appareils s’arrêtent, nous ne pouvons plus contrôler  les paramètres du malade, le respirateur pour oxygéner le malade, s’arrête aussi et il y a grand risque que le patient meurt », confie-t-il.

À la Clinique Médico-chirurgicale Al-Shifa, située dans le 8e arrondissement non loin du lycée la Fidélité, il est 12h. Lorsqu’on entre dans l’enceinte de la cour on est saisi par le vrombissement du groupe électrogène, signe qu’il y a délestage à la clinique.  Pour Balamto Etienne, Directeur administratif de cette clinique, la SNE est dans les oubliettes, le délestage est monnaie courante. Il ajoute même s’il y a de l’énergie, il y a une faible capacité de pouvoir alimenter la clinique. Pour remédier à ce problème, deux groupes électrogènes sont mis à contribution. Balamto Etienne affirme que « les 2 groupes électrogènes consomment 2 fûts de gasoil, soit l’équivalent de 250.000 FCFA par jour ».   Selon Madet Lévis, laborantin, le délestage a un impact négatif son travail et sur les patients. Il relève que la clinique dispose des appareils qui nécessitent de l’énergie. Il ajoute que « sans électricité nous n’arrivons plus à effectuer certains examens et c’est un manque à gagner tant pour la clinique que pour les patients » conclut-il.

Rappelons que le délestage est devenu récurrent ces derniers temps même dans les structures hospitalières. Ils engendrent des conséquences fâcheuses sur la santé des patients. Il freine le travail des médecins et occasionne la mort des patients surtout ce qui sont en salle de chirurgie, de réanimation disent unanimement médecins, personnels soignants et administrateurs des cliniques et des hôpitaux.

Abderamane Moussa Amadaye      

Au lendemain de la condamnation des leaders de Wakit Tamma, lundi 6 juin  à Moussoro à la suite d'une audience foraine, la rédaction d'Ialtchad a sillonné quelques organisations de défenses des droits de l'homme ce mardi 7 juin. La Commission nationale des droits de l'homme(CNDH) et la Ligue tchadienne des droits de l'homme(LTDH) se félicitent de leur libération même si elle est conditionnelle. Elles déplorent le laxisme de la Justice tchadienne dans le respect du droit de la défense. Reportage.

11 heures. Palais de Justice de N'Djamena, capitale tchadienne. La cour grouillait de monde, quelques auditions des prévenus de la maison d'arrêt se déroulaient. Mais les avocats n'ont pas encore levé leur mot d'ordre de grève malgré la libération de leurs collègues arrêtés. Notre objectif est de rencontrer le président par intérim de la Ligue tchadienne des droits de l'homme (LTDH) Me Adoum Mahamat Boukar. Dans son bureau, après de poignées de mains, nous allons à l'essentiel : après procès des leaders des Wakit Tamma à Moussoro.

Me Adoum Boukar estime que même si les leaders de Wakit Tamma ont été libérés, ils ont écopé quand même d’une condamnation avec sursis. Selon lui, la LTDH avait condamné dès le début cette affaire « les droits de la défense n’ont pas été respectés », a-t-il dit. Pour lui, profiter de la bonne foi des gens pour les livrer aux services de renseignements généraux (SRG ) n'est pas du tout normal. À son avis ce n'est pas un bon procès. « C'est une affaire purement politique à qui on a donné un habillage juridique. Alors si la justice se comporte de cette manière, il n'y a plus de garantie pour les citoyens lambda. Il faut que le droit de la défense soit respecté. Les conditions d'un procès équitable ne sont pas réunies, pour ce jugement. Bien que les gens sont libérés, mais c'est une condamnation avec sursis », lance-t-il. Le président de la LTDH, affirme qu'ils s'attendaient à ce que la procédure soit annulée parce qu'elle est nulle au départ. Les avocats, dit-il, ont interjeté Appel et attendent que ces leaders soient rétablis dans leurs droits. Me Boukar assure que jusqu'à ce qu'une nouvelle décision soit prise par la Cour d'Appel, les leaders de Wakit Tamma peuvent exercer librement leurs activités.

13 heures. Nous sommes au bureau de M. Mahamat Nour Ibédou, Président de la Commission nationale des droits de l'homme du Tchad (CNDH). Nous déclinons l'objet de notre visite qui reste le même: après procès de Moussoro. Il répond en affirmant qu'il faut d'abord se féliciter de cette libération même si elle est avec un sursis. Son institution a toujours plaider pour la libération de ses camarades leaders de Wakit Tamma. Il soutient qu'il faut restaurer un climat social afin de nous permettre d'avancer plus sûrement vers le dialogue national inclusif (DNI).  La justice elle aussi a fait preuve de la sagesse, dit le président de la CNDH. « En âme et conscience, ces genres d'arrestations en cette période n'étaient pas la bienvenues. C'est à l'actif de tous, car leur arrestation n'arrangeait personne et dans l'intérêt de personne surtout pas du peuple tchadien », dit M. Ibédou. La justice tchadienne a toujours été liée à l'exécutif, c'est quelque chose à améliorer, dit-il. Le président de la CNDH soutient que jusqu'à nos jours notre justice n'a pas encore retrouvé ses lettres de noblesse. « C'est l'une de nos missions et nous allons faire en sorte que la Justice joue pleinement son rôle en toute objectivité, surtout il y a eu beaucoup d'entorses dans la procédure d'arrestation des avocats. C'était complètement une procédure biaisée. On a marché sur des principes de justice », confie le président de la CNDH.

M. Mahamat Nour Ibédou promet qu'en tant que conseiller du gouvernement, du Conseil national de transition (CNT) et du Président de la République, ils vont dire que la bonne gouvernance dépend du respect des droits de l'homme et des principes.

Moyalbaye Nadjasna

Au lendemain de la condamnation et de la libération des leaders de la société civile, Wakit Tamma Ialtchad a baladé son micro. Quelques citoyens ont donné leurs impressions. Vox pop.

Koumakoye Assina Lazare, « nous sommes content de leur libération, mais seulement leur condamnation avec sursis ne nous plaît pas. La loi n’est pas respectée pour leur condamnation ».

Noubaissim Christian, secrétaire général de syndicats de travailleurs de secteur pétrolier du Tchad « c’est un sentiment de satisfaction parce qu’ils viennent d’être libérés puisqu’ils sont incarcérés injustement. Leur condamnation est une forfaiture, ils voulaient se laver la face. Chaque tchadien qui dit ce qui ne marche pas sera condamné, c’est dommage, mais la lutte continue ».

Ali Hassan Zakaria,  « de toutes les manières je suis sûr de moi, ils seront totalement libérés. Libérés avec sursis n’est pas une libération, c’est pour ne pas qu’ils parlent après. C’est anormal, je pense que Wakit Tamma ne va pas reste les bras croisés, si la justice lève ce sursis, il vont nous trouver sur leur chemin. Si le PCMT est là, c’est pour gérer la transition, il faut qu’il  gère cette transition dans la transparente de la manière démocratique. Nous voyons que c’est une dictature qui dépasse celle du défunt papa. Il faut qu’il arrête  avec tout cette manœuvre de la dictature. C’est eux qui ont signé l’autorisation de la marche, donc il n’y a pas de raison d’arrêter les leaders de Wakit Tamma et de les juger sans respecter la loi. Ce n’est pas le moment de semer les troubles il faut qu’ils respectent la loi » .

Abdelsalam Hissene Adiko, « Wakit Tamma revendique la souveraineté de la gestion de notre pays, je pense que c’est légitime et la transition devait adhérer à cette idée. Donc, il n’est pas normal de jeter en prison certains, au moment où on parle de dialogue. Je ne sais pas qu’ils vont dialoguer avec qui? Pour moi, le dialogue a besoin de toutes ses filles et ses  fils. Donc durant la transition, la voix du peuple, c’est la voix de Dieu. Prenons l’exemple du Mali comparaison n’est pas raison. Nous n’avons pas un problème particulier avec la France, mais elle reste un partenaire du Tchad ».

Idriss Moussa Hamid, étudiant « selon moi, la transition n’a pas respecté la loi. Nous n’avons pas le droit de parler, si on parle on est ciblé. Certaines choses commises ne reflètent  pas l’image d’un pays en voie de développement. Il faut que les dirigeants respectent les textes de la République pour donner le bon exemple pour que les citoyens respectent à leur tour la loi ».

Propos recueillis par Ousmane Bello Daoudou  

Le ministre de la Santé publique et de la Solidarité nationale Dr Abdel-Madjid a assisté ce matin à la cérémonie de lancement de l’opération de transfert monétaire d’urgence aux réfugiés camerounais et les communautés hôtes du site de Guilmey-Farcha, dans le 1er arrondissement de la ville de N’Djamena. La cérémonie a lieu en présence des réfugiés et des autochtones.

Plusieurs hautes autorités composées de membres du gouvernement, de l’ambassadeur du Cameroun au Tchad, du représentant de la Banque mondiale (BM) au Tchad et du délégué du gouvernement auprès de la commune de N’Djamena ont assisté à Guilmey, sortie de la ville de N’Djamena à la cérémonie du lancement de l’opération de transfert monétaire d’urgence aux réfugiés camerounais et communautés hôtes. Ces réfugiés camerounais avaient fui la ville de Kousseri et ses environs suite aux affrontements intercommunautaires. L’opération a lieu grâce au projet d’appui aux réfugiés et communautés d’accueil (PARCA) et avec le soutien financier de la BM, du Haut-Commissariat aux Réfugiés (HCR) et du gouvernement. Cette opération de transfert monétaire concerne les camps de réfugiés de Guilmey, Kalambari et 37 villages d’accueil.

38.052 réfugiés camerounais et 8954 autres personnes des communautés hôtes bénéficieront de cette assistance financière. Les ménages des réfugiés percevront 45.000 frs par individu et les bénéficiaires des communautés d’accueil auront pour part un montant unique de 120.000 frs CFA par ménage.

Cet appui permettra à tous d’assurer leurs besoins essentiels de base. Dans le but de faciliter l’accès aux soins de santé primaire aux réfugiés, le gouvernement a construit et équipé deux espaces de santé sur les sites de Guilmey et de Kalambari.

Cette opération sociale est d’un montant de 3 milliards de frs CFA.

En décembre dernier, de milliers de réfugiés camerounais qui avaient fui les conflits intercommunautaires, étaient accueillis provisoirement dans la forêt de Farcha Milézi, dans le 1er arrondissement de la commune de N’Djamena, puis installés dans les sites de Guilmey et de Kalambari. Le gouvernement tchadien et ses partenaires du système des Nations unies et les ONG s’activent pour la prise en charge holistique.

Avec l’approche de la saison de pluies, les réfugiés des camps précités rencontreront d’énormes difficultés et auront besoin de plus d’appui financier et matériel.  Cette opération de transfert monétaire d’urgence vient à point nommé et soulagera un tant soit peu ces réfugiés composés majoritairement de femmes et des enfants.

Après des affrontements intercommunautaires autour d’un site d’orpaillage la semaine surpassée à Kouri-Bougoudi dans l’extrême Nord du pays qui ont fait de dizaines de morts. Le président du conseil militaire de la transition (PCMT), le général Mahamat Idriss Deby a ordonné l’évacuation du site et de mettre un camp militaire. La démolition et le déguerpissement des orpailleurs sont interprétés de différentes manières par les analystes. Reportage

Trop c’est trop. Le gouvernement refuse de tolérer les conflits intercommunautaires. Après les affrontements intercommunautaires autour du site d’orpaillage de Kouri-Bougoudi qui a fait de dizaines de morts, le PCMT en déplacement dans la localité a ordonné la fermeture du site et le déguerpissement à Wour, chef-lieu du département. Depuis le samedi dernier, plus de 500.000 orpailleurs de plusieurs nationalités à la recherche de métal précieux ont été déplacés à Wour par l’armée nationale. Ce déguerpissement est analysé par différentes manières par les intellectuels.

Pour l’ancien ministre de la Justice, garde de sceaux et enseignant chercheur, Pr Ahmat Mahamat Hassane, le grand BET fait partie des provinces du pays sur lesquelles le gouvernement central depuis les indépendances n’a jamais eu le contrôle total. Selon lui, ce sont les zones qui échappent au contrôle et à la légalité républicaine du pouvoir central. Il rappelle qu’en 1972, le président Ngarta Tombalbaye en visite au Tibesti avait constaté déjà cette carence de l’État et de l’administration dans l’extrême Nord du pays qui ballotte entre la Libye et le Tchad. Ahmat Mahamat Hassan affirme que cette absence de l’État avait poussé le président d’alors à créer la garde nationale nomade du Tchad (GNNT) en intégrant les ressortissants du Tibesti et du Batha. L’enseignant chercheur soutient que pour le cas de Kouri-Bougoudi, l’exploitation de l’or échappe de nos jours au contrôle de l’autorité centrale et créée de risques et de bagarres entre les orpailleurs et prend une allure de conflit intercommunautaire. Il précise que ce n’est pas un conflit intercommunautaire, mais plutôt un groupe des orpailleurs qui ont pris des armes et ont remplacé les autorités locales dans le seul but d’accaparer les terres.

L’ancien ministre de la Justice, garde de sceaux sous le défunt président estime que cette situation est grave et le PCMT est allé mettre en place une base militaire et a demandé aux chefferies traditionnelles d’apporter leur contribution pour pacifier la zone. Pour le Pr Ahmat, c’est une bonne décision, mais la décision centrale, c’est que l’État ne s’est pas imposé. Il suggère qu’il faut revigorer l’autorité de l’État sur place. « La base militaire ne suffit pas, ça risque de créer un défi de rapport de force. Il faut plutôt impliquer les populations elles-mêmes dans la reconnaissance du pouvoir central », dit-il. Le juriste ajoute que ça serait une grande première, si le PCMT arrive à pacifier le Tibesti et notamment la zone des orpailleurs avec d’étrangers venant de l’Ouest du Soudan et qui ont des armes pour défier l’autorité de l’État et des autorités traditionnelles. Le Pr Ahmat Mahamat Hassan souligne que c’est important et les Tchadiens attendent de voir les effets.

La découverte de l’or dans les montagnes du Tibesti en 2012 a déclenché une ruée vers l’or des pays voisins et des autres régions du Tchad provoquant ainsi de tensions et parfois des affrontements meurtriers.

Jules Doukoundjé

C’était une grande gueule des réseaux sociaux. Il s’est fait un nom en s’attaquant violement au régime du défunt président Idriss Deby Itno et a certaines personnalités. Il tirait sur tout ce qui bougeait au nom de l’activisme politique. Il a continué, à l’arrivée du Conseil Militaire de Transition (CMT), dénonçant un coup d’état avant de rallier la transition au nom du dialogue national inclusif. Et de tomber dans le silence. Je reçois l’ex-activiste politique Abel Maina pour faire le point sur les actualités, son retour au pays et les péripéties qui entourent ce retour, ses convictions, la transition…

Bonjour M. Abel Maïna

Bonjour Bello, bonjour à tous les téléspectateurs de Ialtchad. C’est un plaisir pour moi sur le plateau de Ialtchad, un média qui a bercé le début de notre jeunesse et le début du combat que nous menons. C’est grâce à Ialtchad que nous sommes peut-être devenus des activistes. Je me souviens quand j’ai commencé à lire Ialtchad, c’était au début de mes études à Cotonou, au Benin en 2001-2002. C’était le premier site d’information qui me permettait de lire, de savoir, de découvrir. Savoir aujourd’hui que Ialtchad a grandi moi qui a connu Ialtchad pendant toutes ces années, plus de 20 ans. Ialtchad est aujourd’hui le média le plus connu et surtout je suis en studio. Et c’est surtout un honneur pour moi, Bello (permettez-moi de vous tutoyer), de te rencontrer.

Ancien activiste ou toujours activiste ?

Je pense que….puff, cela me fait rire lorsque les gens disent ancien activiste. Parce que les choses pour lesquelles je me suis engagé n’ont pas du tout changé, elles demeurent encore là. Je ne suis un activiste religieux ni pour autre chose. Pour le moment, je suis un activiste des droits de l’homme, contre l’injustice. Et ça même si les gens n’aiment pas je reste activiste.

Est-ce que l’injustice le pays ?

On ne peut pas dire que l’injustice a quitté le pays. L’injustice ne demeure pas seulement dans le pays, mais il demeure dans le monde entier. L’injustice a toujours existé et existera toujours. On doit continuer à se battre contre cela. L’injustice au Tchad ce n’est pas quelque chose qu’on peut bannir, mais qu’on peut atténuer.

M. Maïna vous êtes au Tchad. On est au Tchad. On ne vous entend pas dénoncer les arrestations, on ne vous voit pas manifester. La manifestation et les dénonciations c’est bon quand on est à l’étranger et c’est mauvais quand on est au Tchad seulement?

On est rentré dans le cadre du dialogue national. On ne peut dialoguer en étant dans la rue. Le dialogue il s’asseoir et discuter, quand on est dans la rue avec des cailloux et des pancartes, ce n’est plus le dialogue. C’est le rejet et la dénonciation directe pour ne pas discuter. Nous nous sommes rentrés pour le dialogue national et pour réussir la transition. On ne peut pas être dehors manifester

Abel Maïna, le dialogue est une chose et la transition est une autre chose. Est-ce que vous êtes en train de nous dire, en période de transition, « ne manifester pas, ranger-vous, ne dites rien, attendez le dialogue » c’est cela ?

Non, ça dépend. Nous, nous sommes sortis pendant la tuerie de Sandana, la police nous a embarqués, nous avons étés gazés. Nous sommes sortis pour un cas bien précis, mais lorsqu’il s’agit de la politique, nous ne pouvons pas sortir manifester du. Moment où nous avons accepté dialogue avec le Conseil militaire de transition (CMT).

Lorsque vous dîtes cela « dialoguer avec le CMT », les gens ne sont pas dupes. Vous les 4, vous représentez qui ?

Écoutez, d’abord nous représentons nous-mêmes d’abord. Nous représentons les différentes voies…ce n’est pas une histoire de groupe, de parti politique, de rebelles le dialogue c’est la rencontre de tous les filles et fils du Tchad.

Abel Maïna, dans la lutte, dans l’activisme il y a ce qu’on appelle la cohérence dans les idées et dans l’action. On vous a vu dénoncé le coup d’État constitutionnel du fils qui succède au père. Aujourd’hui vous vous assoyez  ici pour dire « tout ça n’a pas existé ». On balaie ça du revers de la main, c’est cela ?
 
Non je n’ai absolument pas dit cela. Je pense qu’a un moment donné il y a un temps pour la guerre, il y a un temps pour la paix, un temps pour la discussion, un temps pour les injures, un temps pour tout. Le fils nous lui avons dit qu’il a un pouvoir qui n’est pas légitime, parce qu’il n’est pas élu, qu’il n'est pas sorti des élections. Par contre il faut tenir compte de la situation exceptionnelle du Tchad. Est-ce que le président de l’Assemblée nationale est lui-même légitime de prendre le pouvoir ?

C’est quoi la situation exceptionnelle du Tchad ?

La situation exceptionnelle du Tchad, c’est qu’on eut un chef de l’État qui est mort sur le terrain. Et ceux-là qui ont occasionné la mort du chef de l’État n’ont pas pu prendre le pouvoir. Même s’il avait pris le pouvoir ça serait un coup d’État, un renversement du régime.

La constitution le prévoit

La constitution dit que le mandat est de 5 ans, mais son mandat a duré 12 ans sans les élections. Donc lui-même n’est pas légitime.

Donc vous Abel Maine activiste vous préférez le coup d’État que de suivre les textes ?

De toutes les façons, il y a un problème. Haroun Kabadi n’était plus dans les textes parce que les textes ne lui donnaient que 5 ans.

Vous êtes là depuis quelques mois, qu’est ce qui a changé ?

Écoutez beaucoup de choses ont changé.

Donc le système d’avant n’existe plus ?

C’est difficile de dire que le système d’avant n’existe plus parce que le chef est mort au front. Le système a mis beaucoup de temps, on ne peut pas le balayer d’un coup. Il faut du temps, un processus. Ce qui a changé en premier, les opposants sont dans le gouvernement, les activistes indésirables comme nous sont au Tchad, les manifestations sont autorisées, pour la jeunesse les coûts d’Internet a beaucoup baissé, le changement est un processus aujourd’hui on a gagné que les manifestations soient autorisées…

Là les manifestations sont interdites

Les manifestations sont interdites parce qu’a un moment donné…parfois même aux États-Unis, en France les manifestations sont interdites quand cela rentre dans le cadre de la sécurité…

On n’est ni la France, ni les États-Unis

oui on n’est ni la France ni les États-Unis, dans ce cas on n’a pas besoin d’avoir la même démocratie que celle des États-Unis ou de la France.

On est au début de quelque chose, il faut laisser les gens exprimer leurs avis

Les gens expriment leurs avis, mais quand c’est une seule manifestation…les gens se sont attaqués aux biens des particuliers tchadiens, ces stations Total appartiennent aux Tchadiens, ils ne portent que le nom Total, c’est vrai qu’il y le symbole, mais ça appartient aux Tchadiens. II faut savoir qu’au Tchad, il n’y a pas de système d’assurance alors comment est-ce que le commerçant à qui on a détruit les biens, comment il va relancer ses activités. Les casses…

Quels nombres de casses il y a eu concrètement ?

Écoutez même s’il y a eu une seule casse

On a vu quelques pompes de stations chamboulées, pas plus

Même s’il y a une seule pompe chamboulée, ce n’est pas bien.

C’est la faute à qui ?

On ne dira pas que la faute est à X ou Y.

Est-ce que vous en train de dire que cette manifestation n’est pas bonne parce qu’il y a eu des casses malgré que ça s’est passé en dehors de l’itinéraire et des heures de la marche ?

Oui.

C’est une manifestation autorisée, est-ce que vous tenez compte de ça pour juger ?
Non je ne juge pas les manifestants ni les organisateurs des manifestations. Ce n’est pas à moi de le faire c’est à la justice de le faire. Déjà moi ça me pose un certain nombre de problèmes qu’on puisse arrêter des leaders et qu’on les jette en prison pendant plus de deux semaines.

Quel problème cela pose ?

Cela me pose personnellement le problème de respect des droits des individus. On peut les convoquer et les laisser libres. C’est véritablement un problème pour moi au Tchad, pour toute chose on arrête les gens, on les envoie en prison.

Abel Maina, je vous rappelle que c’est une marche autorisée, vous trouvez normal qu’on arrête les leaders de la société civile sans autre forme de procès ?

Je viens de dire que je ne trouve pas ces arrestations normales.

Parce que quand je vous entends c’est comme le discours d’un officiel

Je dis, je n’approuve pas leurs arrestations parce que ce ne sont pas des gens qui vont fuir. Je n’approuve pas qu’on les envoie à Moussoro non plus.

Vous êtes la bande de 4, il y a vous et 3 autres qui sont rentrés. Expliquez-vous aux Tchadiens, car vous êtes pris en charge, nourris, logés aux frais des contribuables tchadiens, est-ce que ce n’est pas gênant ?

Pourquoi cela me gênerait de venir et de trouver le minimum que j’ai déjà. On ne m’a pas pris en France dans la rue, sans maison sans électricité. Lorsque je viens au Tchad invité par le chef de l’État, il faut qu’on me mette dans cette condition.

Combien vous avez reçu pour rentrer au pays ?

Je défi qui que ça soit nous n’avons rien reçu. Je le dis aux Tchadiens, nous n’avons rien reçu.

Vous n’avez rien négocié, même pas un poste ?

Aucun poste, aucune négociation.

Un de vous a été nommé. Êtes-vous en attente d’un poste ?

Nous sommes d’abord venus dans le cadre du dialogue national…

Pourquoi n’avoir pas attendu alors ? Pourquoi n’avoir pas dit nous rentrons sans aucun marchandage ?

C’est normal…nous sommes les invités du chef de l’État

Avez-vous fini avec vos démêlés avec la communauté Béri ?

Je n’ai pas de problème avec la communauté Béri. J’ai des problèmes avec quelques individus qui prétendent être de la communauté Béri.

Vous reconnaissez avoir commis des torts sur une communauté ?

Je ne dis pas que reconnaît avoir commis un tort, mais pour moi cette parenthèse, elle est fermée.

Il n’y a pas un dossier à la justice ?

Quel dossier à la justice ? Vous avez vu un dossier à la justice ? Je n’ai pas reçu de convocation, j’ai reçu deux individus à la maison, ils sont venus faire leur show avec leurs téléphones. Jusqu’aux preuves du contraire, si un procureur ou un juge m’appelle je viendrai.

La France s’ingère-t-elle dans les affaires tchadiennes ?

La France ne soutient que ses intérêts. Si les Tchadiens décident de faire partir le Conseil militaire de transition, la France ne peut pas s’opposer à ça. Le débat sur l’ingérence de la France est un faux problème.

Les préparatifs du Dialogue national, vos impressions ?

Le dialogue national a commencé dès la mort du Maréchal. Et c’est un processus, chaque jour il y a des tractations. Le dialogue est donc en bonne voie.

Le pré-dialogue de Doha avec les politico-militaires, qu’est-ce que vous en pensez ?

Si les gens sont réunis depuis 2 mois à Doha cela veut dire que c’est en bonne voie.

Quel rôle a joué Ibedou dans votre retour ?

Un rôle important

Étiez-vous ses relais ?

Des partenaires, on ne peut pas être ses relais. Nous on a existé dans la lutte associative avant que Ibedou ne se lance en 2011.

Réalisation Bello Bakary Mana

La Banque Mondiale (BM) au Tchad vient de rendre public un communiqué de presse ce 6 juin 2022 à N'Djamena. Le document dit que l’économie du Tchad s’est contractée depuis 2015. Cette contraction économique à empêcher le pays de réduire la pauvreté et d’améliorer ses résultats en matière de développement selon de nouvelles analyses publiées par l'institution de Breton Wood dans le cadre de la deuxième semaine du savoir organisée  du 6 au 8 juin 2022 dans la capitale tchadienne. 

D’après ce communiqué, les auteurs de ces nouvelles analyses soulignent le besoin de développer des chaînes de valeur agricole et d'élevage plus solides afin de diversifier l’économie, assurer une meilleure sécurité alimentaire et promouvoir une croissance durable. Selon ces études, l'important c'est les réformes audacieuses, la réduction des vulnérabilités à long terme, tout en profitant des opportunités offertes par la transition politique, la hausse des prix du pétrole et la restructuration de la dette. La deuxième édition de la semaine du savoir est placée sous le thème: « Nourrir la population tchadienne : vers la transformation des chaînes de valeur de l'agriculture et de l'élevage a été choisi pour lancer les débats sur l'état des connaissances et apporter de nouvelles pistes de réflexion pour améliorer les conditions de vie et promouvoir les opportunités pour la population tchadienne ».

Selon le document, Rasit Pertev, représentant résident de la BM pour le Tchad, a affirmé que, « la crise alimentaire mondiale et l’inflation généralisée en cours doivent inciter à la réflexion quant aux réponses adéquates à apporter surtout dans un contexte aussi fragile et austère que  celui du Tchad ».

Le communiqué  précise qu'au cours de la semaine du savoir, la BM présentera une série de quatre nouveaux rapports. Il s'agit de la note sur la situation économique et de la pauvreté au Tchad qui indique que le PIB du Tchad s'est contracté de 1,2 % en 2021, marquant une deuxième année consécutive de récession. Les raisons identifiées selon le document, c'est la suspension de deux mois de production de pétrole dans les usines Esso, des perturbations de l'activité économique dues à l'insécurité sociopolitique et des contraintes de liquidité en raison des retards dans la restructuration de la dette. Avec une reprise économique lente et fragile, les effets négatifs de la pandémie sur les ménages pauvres et vulnérables devraient perdurer à court et moyen terme, signifie toujours le document.

Le communiqué met en exergue, l’inflation due à la crise Russie-Ukraine. Cette crise indique le document, a également des répercussions négatives sur les ménages les plus pauvres et vulnérables. « Malgré un marché pétrolier porteur qui entraînera une reprise de la croissance en 2022 se poursuivant en 2023-2024, la croissance du PIB par habitant restera négative ou relativement modeste », dit la BM. Les problèmes sécuritaires et les différentes entravent l'exploration des opportunités sur la commercialisation du bétail et de leurs produits, souligne le communiqué. Il ajoute que cette situation est aggravée par les difficultés d’accès au crédit. Le document relève des améliorations significatives en matière de services vétérinaires, de lutte contre les abattages clandestins, et d’infrastructures de marché. Les conclusions de l’étude indiquent que le marché nigérian reste et certainement pour longtemps, le débouché privilégié du bétail tchadien.

Agriculture, un secteur clé de l'économie tchadienne

L’analyse des contraintes et opportunités pour le développement du sous-secteur agricole selon le communiqué confirme que l'agriculture est un secteur clé de l'économie tchadienne. il relève que près de 88% des ménages vivant de l'agriculture de subsistance.  « Cependant les chaînes de valeur agricoles restent sous-développées malgré des avantages comparatifs notamment dans le sésame et la gomme arabique. L’étude souligne aussi l’importance d’améliorer la résilience au changement climatique grâce à des investissements ciblés et l'adoption de pratiques et infrastructures agricoles climato-intelligentes. » La BM estime à travers son communiqué qu'il faut développer les capacités des organisations de producteurs. Ce sont des partenaires essentiels qui doivent saisir les opportunités offertes par les chaînes de valeur porteuses du pays affirme le document.

Le rapport identifie aussi trois contraintes pour une croissance inclusive et résiliente. Ce sont, la violence et la fragilité politique, la volatilité des revenus pétroliers, et l’impact du changement climatique. « Nos analyses concluent que pour créer des emplois et stimuler l’économie, les pouvoirs publics devront se focaliser sur les réformes et les investissements pour améliorer la prestation de services publics, combler les déficits d’infrastructures et permettre le développement du secteur privé dont les chaînes de valeurs agricoles et de l’élevage. Le Tchad ne sera pas en mesure de suivre pleinement les priorités identifiées s’il ne s’attaque pas plus efficacement aux moteurs sous-tendant la fragilité, les conflits et la violence dans le pays », suggère Fulbert Tchana Tchana, économiste principal de la Banque mondiale pour le Tchad.

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